Le voile est levé

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Le voile est levé

Heureuse de me retrouver avec vous.

Je vois aujourd’hui que je me suis trompée sur mon père, sur notre relation. C’est un processus de libération proposé par Michael Gallasch qui ma permis cette nouvelle vision. C’est un grand bonheur, je vous en partage une étape.

Il s’agissait de démontrer à un jury, comme le ferait un avocat et un thérapeute réunis, que mon père était innocent de tout, et cela en m’appuyant sur son histoire et sur mes ressentis. Voici ma plaidoirie 

Mesdames, Messieurs, je viens devant vous aujourd’hui pour vous démontrer de manière irréfutable et définitive que Raymond, mon père, ne pouvait absolument pas être et faire autrement envers moi, Isabelle sa fille.

Je vais vous parler de lui, de sa famille et vous racontez les premières années de sa vie.

Je vais mettre en lien son vécu avec la violence et la dévalorisation qu’il a utilisées avec moi.  Vous comprendrez ainsi qu’il ne pouvait rien faire d’autre que ce qu’il a fait.

Commençons.

Dans quelle ambiance sociale, familiale est-il conçu ? Comment est-il accueilli ?

Raymond nait le 5 février 1934 à Congéniès, petit village du sud de la France. Le 6 c’est les émeutes sanglantes à Paris contre la montée du fascisme. Le premier regroupement entre les socialistes et les communistes. Le pays est en crise, à la recherche d’un leader. C’est soit chacun pour soi, soit on se regroupe pour faire ensemble. La guerre revient. Son père Aimé va faire du marché noir, et Raymond va très inconsciemment choisir le camp des « Chacun pour soi » en fidélité à son père.

Sa mère Marthe fait un mariage de confort, en dessous de ses espérances, avec un mari simple et gentil, Aimé, qui passe presque tout son temps dans ses vignes. Ce mariage lui a permis de fuir la maison familiale, dans laquelle elle s’occupait de sa mère alitée, et de toute sa famille. C’est pour cela que contrairement à ses frère et sœur elle n’a pas fait d’études. Elle a été la remplaçante de la mère, le soutien matériel et affectif de tous au quotidien.

Elle est enceinte de Raymond le mois suivant son mariage, et à 5 mois de grossesse, sa mère meurt. Sa tristesse ne lui permet pas de célébrer la venue de son fils. Raymond est dans un ventre vide de sentiments pour lui.

Et quand il nait, sa mère ne l’allaite pas. C’est une personne à son service qui vient chercher Raymond et l’accompagne quelques maisons plus loin chez sa nourrice, plusieurs fois par jour.

Ceci nous montre l’impossibilité de Marthe de nourrir son enfant, physiquement mais aussi affectivement.

 

Raymond dès sa conception reçoit l’ennui de sa mère, puis très vite sa tristesse. Il sent son non-accueil. Il vit l’abandon. Il va devoir avancer avec cette faille : Sa mère, première femme de sa vie, n’a rien à lui donner.

Et son père Aimé ne le soutient pas. Lui qui lui a été choyé par sa mère et ses sœurs ne comprends pas la situation, ne pousse pas sa femme à prendre sa place auprès de leur fils. Il est seulement gentil… et absent.

Entre ses deux parents, absents différemment, Raymond éprouve de la colère, qu’il refoule au mieux, pour rester gentil comme son père.

 

Quelques années plus tard le frère ainé de Marthe, Fernand, meurt brutalement. Elle s’isole dans sa tristesse et devient dure, fermée à tout lien d’amour. Raymond à 4ans1/2.

Son père à la vigne, Raymond est souvent seul auprès de sa mère, et de fait se trouve à la place de son père, face à une mère froide enfermée dans ses rancœurs et dans ses peines.

Vous voyez combien l’histoire se reproduit : Marthe sa mère a remplacé sa propre mère, lui Raymond remplace son père : c’est la confusion pour ce petit garçon de moins de 5 ans. Vous pouvez déjà comprendre que Raymond a inconsciemment continué à reproduire cette confusion de place avec moi, sa fille.

Il n’a reçu de sa mère que des émotions négatives.  Il n’est pas choyé, il n’est pas regardé. Et quand adulte il va gagner de l’argent, il s’achètera de grosses voitures, chères, pour être enfin vu par LA Femme.

 

Il grandit et réussit facilement à l’école. C’est sa voie pour être vu, au moins de ses professeurs. Il devient sûr de lui, peut-être même arrogant.

Et quand moi sa fille je travaille juste assez pour passer de classe en classe, il ne comprend pas que je n’ai pas d’excellents résultats comme lui. Il ne pense pas à m’apporter son soutien. Et puis lui est-ce que son père l’a soutenu ? Non ! Alors comment aurait-il appris la place d’un père dans la difficulté de son enfant ? Il a juste fait ce qu’il avait toujours connu : il m’a ignorée.

 

A 14 ans il se casse deux dents de devant. Il ne peut plus croquer la vie, il s’est CASSÉ  DEDANS.

Vous voyez bien là jusqu’où Raymond, inconsciemment, peut aller pour calmer son énergie vitale et s’interdire tout débordement. Ça nous permet de mesurer son sens de l’interdit et son incompréhension de cet élan vital qu’il sent grandir en lui.

 

Plus tard, il épouse ma mère qui a de l’admiration pour lui, mais qui soumise à son histoire ne peut répondre à son besoin d’amour démesuré. Elle aussi n’a rien pour lui. Avec le temps elle devient froide et colérique et son travail prend toute sa vie.

Quand j’arrive dans la famille après mon frère, chouchou de ma mère, je deviens vite une petite fille facétieuse pour provoquer le sourire de mon père et lui dire combien je l’aime fort. C’est mon papa adoré, et comme ma mère est absente et préfère mon frère, c’est ma planche de salut. Je lui donne tout mon amour de petite fille, c’est le meilleur des papas, le plus beau aussi. Je me sens fière quand il vient me chercher à l’école et que mes copines le prennent pour mon grand frère. C’est mon premier amour, comme beaucoup de petites filles.

Raymond lui vit avec une énergie sexuelle très puissante, qu’il ne partage plus avec sa femme. Ses dents cassées n’ont pas suffi à juguler ses appétits. Mon amour inconditionnel de petite fille vient percuter ses manques et ses frustrations, il ne sait pas quoi en faire. Dans son élan vers moi sa fille, il n’est pas conscient de ce qui se passe pour lui.

 

Ce soir-là, comme tous les soirs, je viens l’embrasser pour lui souhaiter une bonne nuit. Nous sommes sur son bateau. Ma mère est restée à terre. Il est déjà allongé sur sa couchette. Je me penche sur lui et pose ma main sur sa poitrine pour me baisser vers lui.

Et là, il retient ma main, la fait descendre vers son sexe en érection en me disant « tu vas voir comment il t’aime papa ». Je me dérobe. Il ne bouge pas, ne me rattrape pas. Jamais.

 

Plus tard, ne pouvant toujours pas assouvir ses besoins avec ma mère, il va fantasmer sur des filles plus jeunes, qu’il peut dominer. C’est le chemin qu’il trouve pour vivre cette tension sexuelle qui le déborde, tout en me protégeant.

Avec le temps, comme il ne trouve pas comment diriger cette énergie si forte, il en devient lubrique.

Et moi depuis longtemps je lui reproche son manque d’intérêt pour ma vie, pour mes enfants, pour moi tout simplement.

Mais comment pourrait-il s’interesser à un autre que lui alors qu’il a tellement manqué d’amour ? C’est aussi un moyen sûr de se tenir à distance de moi, pour ne plus m’imposer sa sexualité.  Et puis dans sa famille on ne s’intéresse pas, on ne félicite pas, on ne soutient pas, des fois que l’autre se sentirait trop important !!! Alors toujours par fidélité et ignorance, il reproduit.

 

Pour finir, j’ai regardé la signification de son prénom RAYMOND : c’est « celui qui protège avec ses conseils avisés ». Et c’est aussi celui qui se méfie de tout ce qui vient du féminin : intuition, sentiments, psychologie…

En langage des oiseaux, vient « mon rayon ».

Je comprends que le défi de cet homme, mon père, est de passer de l’égoïsme à l’altruisme, d’aller de la méfiance vers l’ouverture. Il n’a pas reçu suffisamment de bon pour entreprendre cette tâche, à une époque où les opportunités de réfléchir sur soi n’étaient guère présentes, et bien peu accessible et valorisé dans son milieu.

 

Alors maintenant que vous avez compris que mon père ne pouvait rien faire d’autre que d’être confus avec moi et de masquer son intérêt, je veux vous montrer le cadeau qu’il m’a transmis malgré toutes ses difficultés.

Moi aussi mon énergie vitale est puissante, c’est son premier cadeau.

J’ai tendance à m’endormir dessus, à ne pas la considérer, au mieux à la réduire à une sexualité passionnelle, sans doute par peur d’être à mon tour débordée.

Mais aujourd’hui son histoire me montre juste l’inverse, je dois trouver une autre voie que lui, et son exemple est son deuxième cadeau.

Raymond, mon père, au-delà de son impossibilité à trouver son chemin, est arrivé à m’indiquer le mien. Et je ressens aujourd’hui tout l’amour qu’il m’a porté.

 

Je m’engage à prendre soin de mon énergie vitale, à l’apprivoiser en conscience, pour en finir avec ma tristesse et mon ennui. Cette énergie est porteuse de paix, à moi de trouver sa pleine expression.

 

Une délicieuse journée à vous, et un doux merci pour votre présence.

 

 

 

 

6 Comments

Je suis impressionnée par ta capacité à retranscrire ainsi ton histoire et a la mettre à distance pour avancer avec tout ce que tu es.
Merci de ce partage aussi authentique que touchant.

Je suis toujours touchée par ton authenticité Isabelle ! Merci pour ce cadeau que tu me fais à travers ton récit. Connaître l’histoire qui a précédé permet d’éclairer sa propre histoire.

PS : comment as tu pu reconstruire l’histoire de tes grands-parents ?

Merci Colette pour ton accueil si doux.

Pour l’histoire de mes grands-parents, après avoir regroupé le peu d’infos que j’avais, Michael m’a guidée pour retrouver mes ressentis d’enfants auprès d’eux, et les relier à des élements de ma vie d’aujourd’hui. Leur histoire c’est peu à peu éclairée.

Merci Gwenaëlle de tes mots.

J’aime la simplicité accueillante que je vis dans nos échanges, elle éclaire mon chemin.
Merci pour cette présence complice.

Et à tout bientôt, OUI!!!

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